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A LA NUIT


 
O vénérable Nuit, dont les urnes profondes
Dans l’espace infini versent tranquillement
Un long fleuve de nacre et des millions de mondes,
         Et dans l’homme un divin calmant,

Tu berces l’univers, et ton grand deuil ressemble
A celui d’une veuve exercée aux douleurs,
Qui pense au lendemain inexorable, et tremble
Pour son enfant qui dort les mains pleines de fleurs.

Tu regardes la terre avec mélancolie ;
Tu ne ris point là-haut comme le jour moqueur ;
Tu plains les maux de l’homme, et pour qu’il les oublie
         Tu poses la main sur ton cœur.