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Fuyez, fuyez, oiseaux, à la fange rebelles,
      Du poids fatal les seuls vainqueurs !
A vous le jour, à vous l’espace ! à vous les ailes
Qui promènent les yeux aussi loin que les cœurs !

Vous donnez en jouant des frissons aux charmilles ;
Vos chantres sont des bois le délice et l’honneur ;
Vous êtes, au printemps, bénis dans les familles :
Vous y prenez le pain sur les lèvres des filles ;
Car vous venez du ciel et vous portez bonheur.

Les pâles exilés, quand vos bandes lointaines
Se perdent dans l’azur comme les jours heureux,
Sentent moins l’aiguillon de leurs superbes haines ;
Et les durs criminels chargés de justes chaînes
Peuvent encore aimer, quand vous chantez pour eux.

Chantez, chantez, oiseaux, à la fange rebelles,
      Du poids fatal les seuls vainqueurs !
A vous la liberté, le ciel ! à vous les ailes
Qui font vibrer les voix aussi haut que les cœurs !