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— me dit Régina en me remettant un papier. — Allez d’abord chez Mme Wilson porter ma lettre, puis vous ferez cette autre commission.

Au moment où j’allais sortir, la princesse ajouta avec beaucoup de bienveillance et de dignité :

— C’est grâce aux excellentes recommandations du docteur Clément, que je vous donne une preuve de confiance dès le premier jour de votre entrée à mon service ; j’espère que vous y répondrez par votre zèle et par votre discrétion.

— Je ferai tout ce que je pourrai afin de satisfaire Madame la princesse.

Et je quittai l’appartement de Mme de Montbar.

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Il m’est impossible d’exprimer les mille pensées dont je fus agité en suite de ma première entrevue avec Régina ; ce fut une sorte d’étourdissement d’esprit si violent que je montai en hâte à ma chambre, afin de me recueillir et de reprendre le sang-froid nécessaire pour supporter, sans trouble, les regards de mes nouveaux camarades.

L’impression terrible qui domina d’abord toutes les autres, et que je ne cherchai pas à me dissimuler, tant elle m’épouvantait, fut un ressentiment d’amour passionné… brûlant… sensuel, que je n’avais jamais éprouvé pour Régina. Jusqu’alors toujours grave et austère, entourée du prestige sacré de sa tristesse filiale, Régina m’était apparue dans une sphère si élevée, elle placée si haut, moi si bas et si loin, que je n’avais pu subir l’influence de la femme… de la femme jeune, belle, charmante.