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ma rudesse n’a pas… car, pour la délicatesse et la sensibilité, c’est un cœur de femme… que celui de mon Just… aussi je le compare à celui de la plus noble femme que je connaisse.

Involontairement je songeai à Régina, pour laquelle le docteur Clément paraissait ressentir la plus tendre sollicitude.

Le vieillard reprit :

— D’ailleurs, tu verras bientôt mon fils, et tu l’aimeras, puisque tu fais désormais partie de ma famille… car je suis un peu patriarche dans ma façon d’envisager les serviteurs, — ajouta-t-il en souriant doucement. — Suzon t’a dit que vous dîniez tous deux avec moi ; quant à tes fonctions domestiques… la différence d’âge qui existe entre nous deux, te les rendra presque naturelles… il n’y a rien d’humiliant dans les services qu’un jeune homme rend à un vieillard…

— Cela est vrai. Monsieur, — lui dis-je, pénétré de tant de bontés, — et d’ailleurs, celui qui m’a recueilli et élevé, m’a enseigné par son exemple, qu’il n’y a, comme il me le disait, aucune position de la vie, si infime qu’elle soit, dans laquelle l’homme ne puisse faire acte de dignité.

— Cela est d’un jugement sain, et d’un esprit élevé, — reprit mon maître, touché de ces paroles que m’avait si souvent répétées Claude Gérard. — Tout ce que tu m’as raconté de la vie, du caractère et des habitudes de cet homme, me donnent, d’ailleurs, une haute idée de lui… Et…

Puis, s’interrompant soudain, comme si quelque souvenir lui revenait à la pensée, le docteur reprit.