Depuis quelque temps le docteur m’avait soumis à un nouveau traitement dont il espérait beaucoup de succès. Le jour vint où l’on devait lever un certain appareil qui recouvrait mes yeux ; le docteur convia à cette opération, sans doute curieuse, l’un de ses confrères. Il lui fit l’historique de ma maladie, pendant les préparatifs dont s’occupaient sans doute les aides.
— Et depuis combien de temps est-il dans cet état ? — demanda le confrère du docteur Clément.
— Depuis un an, — répondit-il ; puis il ajouta plus bas à son ami : — Eh ! mon Dieu… tenez, ce pauvre garçon est entré ici juste la veille du jour où je vous ai demandé de venir en consultation avec moi auprès de Mlle de Noirlieu ; car, je l’avoue… je ne pouvais et je ne puis me rendre compte des étranges symptômes nerveux qui s’étaient tout à coup manifestés chez elle.
— Je crois que nous ne nous trompions pas, — reprit l’ami du docteur, — en attribuant ces singuliers symptômes à quelque émotion violente et soudaine ;… pourtant, notre chère malade niait opiniâtrement avoir éprouvé le moindre saisissement. À propos, comment va-t-elle ?
— Moins bien qu’avant son mariage, — reprit le docteur Clément ; — aussi, je la veille avec une grande sollicitude… c’est une femme si rare… quel cœur ! quelle âme ! comme c’est beau, comme c’est pur, comme c’est élevé !…
— Du reste, il est impossible de voir une union mieux assortie… — reprit le confrère du docteur ; — le prince de Montbar est un des hommes les plus aimables, les plus distingués que l’on puisse rencontrer.
— C’est possible, — reprit brusquement le docteur Clément.
Puis apercevant sans doute un de ses aides qui était allé chercher quelques objets nécessaires à la levée de l’appareil, le docteur ajouta :
— Ah ! voilà… ce que j’attendais… nous allons maintenant lever l’appareil…
Il est aussi inutile qu’impossible de rendre les émotions auxquelles je fus en proie pendant cette opération qui allait peut-être me rendre la vue… au moment où j’apprenais le mariage de Régina