Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 9.djvu/276

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tions et apparitions, la nature des choses révélées, la qualité de ta personne, l’Église déclare ces choses mensongères, séductrices, pernicieuses, et procédant du malin esprit et du diable… »

Le chanoine Maurice s’interrompt pendant un moment après la lecture de ce premier chef d’accusation, afin que sa gravité puisse être pesée, appréciée, par Jeanne Darc ; mais les paroles qu’elle vient d’entendre la reportant aux premiers temps de son jeune âge, jours paisibles écoulés au milieu des douces joies de la famille, elle oublie le présent et s’absorbe dans les souvenirs de son enfance avec une mélancolie amère et douce à la fois.

le chanoine maurice. — « Secondement, Jeanne, tu as dit que ton roi, te reconnaissant à des signes comme véritablement envoyée de Dieu, t’avait donné des gens d’armes pour batailler ; tu as dit que sainte Marguerite et sainte Catherine t’avaient accompagnée à Chinon et en d’autres lieux, où elles te guidaient de leurs conseils.

» Jeanne, l’Église déclare cette affirmation menteuse, fallacieuse, dérogatrice à la dignité des saintes et des anges.

» Troisièmement, Jeanne, tu as dit que tu avais reconnu les anges et les saintes aux conseils qu’ils te donnaient ; tu as dit que tu crois ces apparitions bonnes, que tu y crois aussi fermement qu’à la foi de Notre-Seigneur Jésus-Christ.

» Jeanne, l’Église déclare que ce ne sont point là des signes suffisants pour reconnaître des saints et des saintes ; que tu as cru témérairement, affirmé avec jactance, et que tu erres dans la foi… »

Jeanne Darc, sortie de sa rêverie, écoutait cette nouvelle accusation sans la comprendre. Où était la jactance ? la témérité ? le mensonge ? Elle avait reconnu ses saintes à la sainteté de ces conseils : « — Jeanne, sois pieuse, conduis-toi en fille sage, — lui disaient ces voix mystérieuses ; — le ciel te prêtera son aide pour chasser l’étranger de la Gaule. » — Et la promesse de ses saintes s’était accomplie,