Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 8.djvu/306

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de ces apparitions ne troublait en rien leurs facultés intellectuelles, leur jugement. Complétons cette étude physiologique par une dernière citation, empruntée à un autre savant d’une renommée européenne :

« … Le cerveau, mis en action par une impression violente, peut être fortement ébranlé, et cet ébranlement déterminer un état convulsif du cerveau qui produit les hallucinations, les visions les plus multipliées.

» Ces idées, ces images, sont ordinairement relatives aux occupations de corps et d’esprit auxquelles se livrait l’halluciné ; ou bien elles se lient à la nature de la cause même qui a produit l’ébranlement du cerveau… »

Vous comprendrez toute l’importance de l’assertion scientifique précédente, chers lecteurs, lorsque vous saurez comment et pourquoi Jeanne Darc, depuis l’âge de quatorze ans jusqu’à sa dix-septième année, fut constamment absorbée, obsédée par la pensée de mettre un terme aux maux affreux déchaînés sur la France par la domination anglaise, maux dont la famille Darc avait souvent cruellement souffert, ainsi que tant d’autres familles de laboureurs.

Continuons nos citations.

« Exemples (dit notre auteur) : Un homme est arrêté, jeté dans un cachot, rendu peu de temps après à la liberté ; il voit, il entend partout des dénonciateurs, des agents de police prêts à l’arrêter de nouveau.

» 2° Une femme lit un ouvrage fantastique sur le sabbat ; son esprit se frappe, elle se voit transportée au sabbat ; elle est témoin de toutes les pratiques dont elle a lu la narration avant sa vision.

» 3° Une dame lit dans un journal le récit de l’exécution d’un parricide ; elle voit partout une tête ensanglantée séparée du tronc et couverte d’un crêpe noir. Cette vision inspire à cette dame une horreur inexprimable et lui fait tenter plusieurs moyens de se détruire (p. 69).

» L’hallucination peut encore dépendre des répétitions multipliées des mouvements du cerveau pour approfondir quelque sujet… Dès lors, l’action intérieure du cerveau prévaut sur celle des sens externes ; dès lors est brisée la marche naturelle de l’entendement humain ; dès lors il y a délire, il s’établit une sorte d’à-parte chez les visionnaires, de même qu’il s’en établit parfois chez les personnes les plus raisonnables, absorbées ou préoccupées par quelque profonde méditation (p. 70).

» Quelquefois les hallucinations sont fugaces, confuses ; mais le progrès de la maladie les rend aussi distinctes que les sensations actuelles. Souvent, au milieu d’une conversation, l’halluciné s’ar-