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disant à petit bruit en manière d’appel : « Hé… hé… Jean-Quatre-Sous. » Puis mon homme ajoute après un moment de silence : — « Il n’est pas encore arrivé… au diable le musard ! — Il n’y a pas de temps perdu, — répond une autre voix ; — il ne lui faut que trois heures pour se rendre à cheval à Charenton. »

— La chose est grave, — reprit Mahiet. — C’est à Charenton que le régent tient ses quartiers.

— Justement ; aussi tu dois penser combien je me félicitais de ma découverte ; évidemment il se tramait quelque complot avec le parti de la cour. Enfin Jean-Quatre-Sous arrive par l’autre côté de l’arcade, et l’homme à chaperon fourré lui dit : — « Es-tu prêt à partir ? — Oui, mon cheval est sellé dans l’écurie de l’auberge des Trois-Singes. — Voici la lettre, — reprend la voix du chaperon fourré. — Fais toute diligence pour te rendre au quartier de l’armée royale ; tu remettras ta missive au sénéchal du Poitou, c’est convenu avec lui. — Mais me laissera-t-on sortir de la ville ? — demande le messager. — Ne crains rien à ce sujet, — lui répond-on. — La porte Saint-Antoine est gardée ce soir par des hommes qui sont à nous. Maître Maillart doit se trouver avec eux, tu leur diras pour mot de ralliement : Montjoie au roi et au duc ; ils te laisseront passer ; donc à cheval, à cheval ! » Après quoi le chaperon fourré et ses deux compères s’éloignent d’un côté, Jean-Quatre-Sous de l’autre. Je sors de ma niche, où je figurais tant bien que mal saint Nicolas, et je suis le messager, que je puis envisager au dehors de la voûte à la clarté de la lune. Ce ribaud était grand, fort et bien armé ; je voulais m’emparer de la lettre qu’il portait. Comment faire ? J’y songeais, lorsque je le vois entrer dans la taverne des Trois-Singes. Je pensais qu’il allait prendre son cheval à l’écurie ; point… Jean-Quatre-Sous, en homme de prévoyance, demande à souper avant de se mettre en route, et à travers la porte ouverte je le vois s’attabler. Bacchus a voulu que j’aie souvent vidé plus d’un pot dans la taverne des Trois-Singes sans le casser après boire. Je connais l’hô-