Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 8.djvu/247

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

berge où elle logeait, et pensait parfois que, malgré son nom, mal sonnant pour une taverne, Rufin-Brise-Pot ne ferait peut-être point un mauvais mari ; elle sentait, en outre, sa vanité assez flattée par l’espoir d’ouvrir un cabaret dont les principaux clients seraient messires les écoliers de l’Université. Alison, accueillie avec bonté par Marguerite et par Denise, leur conservait une grande reconnaissance ; elle accourait ce soir-là chez elles dans l’espoir de leur être utile. Marguerite, s’apercevant de l’inquiétude peinte sur les traits de la cabaretière, lui dit affectueusement :

— Bonsoir, chère Alison… vous semblez alarmée… Que se passe-t-il donc ?

— Ah ! dame Marguerite, je n’ai que trop sujet d’être inquiète, sinon pour moi, du moins pour vous. — Et, s’interrompant, elle ajouta : — D’abord, et afin de ne pas oublier cette circonstance, je dois vous prévenir qu’en entrant ici j’ai remarqué trois hommes, la figure cachée par leur capuce, qui semblaient…

— Épier la maison, n’est-ce pas ? — demanda Denise. — En effet, Agnès, notre servante, les a aussi remarqués.

— À quoi bon cet espionnage ? — reprit Marguerite. — Marcel marche le front haut, ne cache nullement ses actions… Mais il n’importe ! la haine s’attache maintenant à ses pas… Je vous remercie de ce renseignement, Alison ; il peut être utile.

— Oh ! ce n’est pas seulement cela qui m’amène ici… Hélas ! il m’est pénible de vous apporter peut-être une mauvaise nouvelle, à vous, dame Marguerite, qui m’avez accueillie avec tant de bonté à mon arrivée du Beauvoisis.

— Mahiet, notre ami, vous recommandait à notre intérêt, il nous instruisait de vos malheurs et de vos tendres soins pour cette infortunée Aveline-qui-jamais-n’a-menti, à qui Mazurec devait si peu survivre ; notre bienveillance à votre égard était naturelle. Mais de quoi s’agit-il ?

— Ce soir, dans ma chambre, à l’auberge, je regardais par ma