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côtés sortaient des profondeurs de la forêt, attirés par ces cris de leurs compagnons aux prises avec les archers :

— Tue, tue les Anglais !… À mort les Anglais !…

Écrasés par le nombre, tailladés à coups de faux, éventrés à coups de fourche, assommés à coups de coignée, pas un des hommes du capitaine Griffith n’échappa au carnage. Le chapelain, après s’être héroïquement défendu contre Adam-le-Diable, armé d’un coutre de charrue, et contre Rufin, faisant rage de sa longue épée, tomba sous leurs coups. Mazurec, distrait de son acharnement contre les restes sanglants du bailli, par l’arrivée des paysans et de Guillaume Caillet, brandit sa fourche, prêt à se joindre aux combattants ; mais frappé d’une idée subite, il gravit le monticule où était pratiquée, au-dessus du souterrain, l’ouverture récemment bouchée par les ordres du seigneur de Nointel, et, se servant de sa fourche comme d’un levier, il fait rouler au loin les pierres qui obstruaient ce soupirail. La fumée, trouvant une issue, s’en échappe à flots pressés, noirs et épais ; Mazurec, rentrant alors dans la caverne, y disparaît.

À ce moment, Mahiet, blessé au bras, mais tenant sous ses genoux le capitaine Griffith, cherchait son poignard à sa ceinture pour le lui plonger dans la gorge en disant : — Tu vas mourir, chien d’Anglais qui veux forcer jusqu’aux femmes mourantes !

— Aussi vrai que tu es la meilleure épée que j’ai rencontrée dans ce pays de couarde seigneurie, mon seul regret est de n’avoir pas violé cette dodue commère !

Telles furent les dernières paroles du bâtard de Norfolk ; Mahiet mit fin à la vie de ce brigand, tandis que, à quelque distance du lieu du combat, Mazurec sortait du souterrain portant entre ses bras le cadavre d’Aveline, et s’écriait d’une voix entrecoupée :

— Guillaume, voilà votre fille ! voilà ma femme !… Et vous tous qui avez des femmes, des fils, des parents, des amis, entrez dans ce souterrain ; cherchez-les parmi les morts et les agonisants ! Nous n’avons pas voulu donner d’argent pour payer la rançon de notre sei-