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d’hui, 30 avril, ce récit de la mort du dernier des rois de la race de Karl-le-Grand.

Hugh-le-Chappet, comte de Paris et d’Anjou, Duc de l’Île-de France, Abbé de Saint-Martin, de Tours et de Saint-Germain-des-Près, s’est fait (le 3 juillet de cette année-ci 987) proclamer roi par sa bande de guerriers, à l’exclusion de l’oncle de Ludwig, et sacrer roi de France par l’Église ; dans deux mois, selon le temps prescrit par les Conciles, il doit épouser Blanche, la veuve de Ludwig-le-Fainéant, Blanche, la reine empoisonneuse... dont le crime abominable assura l’usurpation de ce Hugh-le-Chappet. Ainsi se fondent les royautés... Puisse un jour la race de ce Chappet expier comme les autres lignées royales issues de la conquête, l’iniquité de son origine !

Voici l’explication de mon feint idiotisme : J’ai été élevé par mon père, de même qu’il l’avait été par le sien, dans la haine de ces rois étrangers à la Gaule. Mon aïeul Guyrion, mort massacré dans un soulèvement populaire, avait, fidèle à la volonté de Joel transmise d’âge en âge à sa descendance, enseigné à mon père à lire et à écrire, afin qu’il pût augmenter la chronique de notre famille ; il conservait pieusement, comme je le conserve, le fer de flèche barbelé, ainsi que le récit laissé par son grand-père Eidiol, le doyen des nautonniers parisiens. Nous ignorons ce qu’est devenue la branche de notre famille qui habitait la Bretagne, auprès des pierres sacrées de Karnak ; elle possède ces légendes et ces reliques laissées à travers les âges par un si grand nombre de nos générations... Qui sait, hélas ! si nous reverrons jamais ces frères de notre race ! Mon aïeul et mon père n’ont rien écrit sur leur vie obscure ; mais dans la profonde solitude où nous vivions, le soir, après ses journées de chasse ou ses travaux de labour, mon père me racontait ce qu’il avait appris de mon aïeul Guyrion sur les aventures des fils de Joel ; ces traditions, Guyrion les tenait d’Eidiol, qui les tenait de son aïeul, établi en Bretagne avant la séparation des petits-fils de Vortigern. Ces récits se gravant profondément dans ma mémoire, m’inspiraient l’horreur