avec ma sœur Ellèn et avec vous… oublieux Scanvoch ? — me répondit-elle avec un sourire affectueux. — Je veux fêter ce jour, selon notre vieille mode gauloise ; j’ai été chercher ces fleurs pour orner la porte de la maison, le berceau de votre cher petit Aëlguen et la coiffure de sa mère… Mais vous-même, où allez-vous si matin armé en guerre ?
À la pensée de cette journée de fête, qui pouvait devenir une journée de deuil pour ma famille, j’ai étouffé un soupir et répondu à la sœur de ma femme en souriant aussi, afin de ne lui donner aucun soupçon :
– Victoria et son fils m’ont hier soir chargé de quelques ordres militaires à porter au chef d’un détachement campé à deux lieues d’ici ; l’habitude militaire est d’être armé pour porter de pareils messages.
– Savez-vous, Scanvoch, que vous devez faire beaucoup de jaloux ?
– Parce que ma sœur de lait emploie mon épée de soldat pendant la guerre et ma plume pendant la trêve ?…
– Vous oubliez de dire que cette sœur de lait est Victoria, la Grande… et que Victorin, son fils, a presque pour vous le respect qu’il aurait à l’égard du frère de sa mère… Il ne se passe presque pas de jour sans que lui ou Victoria vienne vous voir… Ce sont là des faveurs que beaucoup envient.
– Ai-je jamais tiré parti de cette faveur, Sampso ? Ne suis-je pas resté simple cavalier ? refusant toujours d’être officier ? demandant pour toute grâce de me battre à la guerre à côté de Victorin ?
– À qui vous avez deux fois sauvé la vie, au moment où il allait périr sous les coups de ces Franks si barbares !
– J’ai fait mon devoir de soldat et de Gaulois… ne dois-je pas sacrifier ma vie à celle d’un homme si nécessaire à notre pays ?
– Scanvoch, je ne veux pas que nous nous querellions ; vous savez mon admiration pour Victoria, mais…
– Mais je sais votre injustice à l’égard de son fils, — lui dis-je en souriant, — inique et sévère Sampso.