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— Je suis de votre avis, — répondit le prince des prêtres ; — je vais demander à l’un des officiers de Ponce-Pilate de faire garder le Nazaréen dans le prétoire de la cohorte romaine jusqu’à l’heure du supplice.

Geneviève vit alors, pendant que le prince des prêtres allait s’entretenir avec un des officiers de Ponce-Pilate, le chef des miliciens se rapprocher de Jésus… bientôt elle entendit cet officier, répondant sans doute à quelques mots du jeune maître, lui dire d’un air railleur et cruel :

— Tu es bien pressé de t’étendre sur la croix… Il faut d’abord qu’on la construise, et ce n’est pas fait en un tour de main… Tu dois le savoir mieux que personne, toi, en ta qualité d’ancien ouvrier charpentier.

L’un des officiers de Ponce-Pilate, à qui le prince des prêtres avait parlé, vint alors trouver Jésus, et lui dit :

— Je vais te conduire dans le prétoire de nos soldats ; lorsque ta croix sera prête, on l’apportera, et sous notre escorte tu te mettras en route pour le Calvaire… Suis-nous !

Jésus, toujours garrotté, fut conduit à peu de distance de là, par les miliciens, dans la cour où logeaient les soldats romains ; la porte, devant laquelle se promenait un factionnaire, restant ouverte, plusieurs personnes qui avaient, ainsi que Geneviève, suivi le Nazaréen, demeurèrent en dehors pour voir ce qui allait advenir.

Lorsque le jeune maître fut amené dans la cour du prétoire (on appelle ainsi les bâtiments où logent les soldats romains), ceux-ci étaient disséminés en plusieurs groupes : les uns nettoyaient leurs armes ; les autres jouaient à plusieurs jeux ; ceux-ci maniaient la lance sous les ordres d’un officier ; ceux-là, étendus sur des bancs au soleil, chantaient ou causaient entre eux. On reconnaissait, à leurs figures bronzées par le soleil, à leur air martial et farouche, à la tenue militaire de leurs armes et de leurs vêtements, ces soldats courageux, aguerris, mais impitoyables, qui avaient conquis le monde, laissant