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« Hésus ! Hésus !… par ce sang qui va couler, clémence pour la Gaule !…

» Gaulois, par ce sang qui va couler, victoire à nos armes !… »

Et le barde a ajouté :

« Le chef des cent vallées est sauf… espoir pour nos armes !… »

Et tous les captifs gaulois, hommes, femmes, enfants, qui assistaient au supplice, ont ensemble répété les dernières paroles des druides, les acclamant d’une voix si puissante, que l’air en a vibré jusque dans ma prison.

Après ce chant suprême, le barde et les deux druides ont tout à tour porté leurs têtes sacrées sur le billot, et elles ont roulé comme les têtes des anciens de la ville de Vannes (A).

À ce moment, tous les captifs ont entonné d’une voix si forte et si menaçante le refrain de guerre des bardes : « Frappe le Romain !… frappe… frappe à la tête !… frappe fort le Romain !… » que les légionnaires, abaissant leurs lances, ont resserré précipitamment les captifs, désarmés et garrottés pourtant, dans un cercle de fer hérissé de piques… Mais cette grande voix de nos frères était venue jusqu’aux blessés, renfermés, comme moi, dans le hangar, et tous, et moi-même, nous avons répondu aux cris des autres prisonniers par le refrain de guerre :

« Frappe le Romain !… frappe… frappe à la tête !… frappe fort le Romain !… »

Telle a été la fin de la guerre de Bretagne, de cet appel aux armes fait par les druides du haut des pierres sacrées de la forêt de Karnak, après le sacrifice volontaire de ma sœur Hêna… de cet appel aux armes terminé par la bataille de Vannes. Mais la Gaule, quoique envahie de toutes part, devait résister encore. Le chef des cent vallées, forcé d’abandonner la Bretagne, allait soulever les autres populations restées libres…

Hésus ! Hésus ! ce ne sont pas seulement les malheurs de ma sainte et bien-aimée patrie qui ont déchiré mon cœur… ce sont aussi les