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missive que lui envoie Billaud-Varenne, la décachète avec un battement de cœur involontaire. Bientôt Cléry, valet de chambre de Louis XVI, averti par le concierge, traverse la pièce occupée par l’officier municipal et entre chez son maître.

— Eh bien, Cléry, quel temps fait-il ce soir ? — demande à haute voix Louis XVI à son serviteur, afin de savoir de lui par cette interrogation convenue et à double entente, si, grâce à ses intelligences avec le dehors, il avait eu de récentes communications au sujet du complot. — Avez-vous examiné de nouveau le ciel ? que présage-t-il pour demain ?

— La journée de demain semble toujours devoir être belle, ainsi que j’ai eu déjà l’honneur de le dire au roi, — répond Cléry, n’ayant reçu aucune nouvelle, mais croyant à la persistance des projets des conspirateurs ; et Louis XVI, jusqu’à la fin de son coucher, continue de s’entretenir à haute voix de sujets indifférents avec son serviteur, afin d’écarter tout soupçon de l’esprit du gardien municipal.

Jean Lebrenn, après la lecture de la lettre de l’avocat Desmarais, crut pendant un moment rêver ; tant était profonde sa surprise, qu’il hésitait à ajouter foi à ce bonheur inattendu, cette réalisation de ses plus chères espérances. En vain il cherchait à pénétrer la cause de la condition mise par l’avocat au mariage de sa fille avec Jean Lebrenn ? condition qui, d’abord rigoureusement examinée par celui-ci, au point de vue du devoir, de l’honneur et de la délicatesse la plus ombrageuse, lui parut acceptable, en cela qu’elle se bornait à exiger de lui l’observance d’une discrétion dont il ne s’était point jusqu’alors départi à l’endroit de son amour pour Charlotte, amour dont Victoria était la seule confidente.

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À quoi bon peindre l’ineffable félicité de Jean Lebrenn ? On la devine. Il acheva sa nuit dans une délicieuse insomnie, s’abandonnant tout éveillé aux rêves d’un avenir enchanteur.

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