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alors le coup de main, dans l’espoir que l’horreur de ce régicide augmenterait le nombre de nos partisans ? secondement, et c’est moi, proprio motu, qui pose cette grave question, sous ma responsabilité : ne serait-il point expédient, dans l’intérêt bien entendu de l’Église et de la monarchie, de laisser purement et simplement guillotiner… Louis XVI ?

Cette proposition, aussi étrange qu’inattendue, formulée par le jésuite avec un calme glacial, jette ses auditeurs dans une telle stupeur qu’ils restent muets et la bouche béante. Le silence est interrompu par le bruit de trois coups frappés discrètement à la porte de la chambre.

LE JÉSUITE MORLET. — C’est mon fillot (D’une voix plus haute :) Entrez !

Le petit Rodin entre : il est vêtu d’une carmagnole et d’un bonnet rouge à l’instar du révérend ; il salue benoîtement la compagnie.

LE JÉSUITE MORLET. — Quoi de nouveau, mon enfant ?

LE PETIT RODIN. — Doux parrain, il y a en bas, chez le portier, un homme déguisé en femme ; il a exactement donné le mot de passe et de ralliement ; mais le portier, ne connaissant pas cet individu, a répondu qu’il ne savait pas ce qu’il voulait lui dire avec ses mots de passe, le portier craignant d’être dupe d’un mouchard. Et il a vite envoyé sa femme me prévenir de ce qui arrive.

LE COMTE DE PLOUERNEL. — C’est sans doute quelqu’un des nôtres, obligé de recourir à ce déguisement, afin de se soustraire aux poursuites dont il est l’objet.

L’ÉVÊQUE. — C’est fort grave ; comment s’assurer que ce personnage est des nôtres ?

LE MARQUIS. — Un homme déguisé en femme : quel carnaval ! hi ! hi ! hi !

LE JÉSUITE, au petit Rodin. — Tu connais de vue tous nos amis ?

LE PETIT RODIN. — Oh ! oui, doux parrain, car dès que j’ai vu quelqu’un une fois, je n’oublie jamais sa figure : le Seigneur Dieu