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la jeune fille avec un doux sourire. — Écoute, écoute, te souviens-tu qu’hier soir, après que mon père et toi vous avez eu donné votre consentement à mon mariage avec Jean, nous sommes, lui et moi, restés seuls pendant quelques instants ?

— Oui.

— Voici ce que Jean m’a appris : il est allé, avant de venir ici, voir M. Billaud-Varenne, espérant deviner par son entretien quelle pouvait être la cause de la condition singulière que mon père mettait à notre union, et Jean a appris de M. Billaud-Varenne que celui-ci avait été chargé d’offrir ma main…

—… À M. de Saint-Just ; je le savais, mon enfant, et je ne croyais pas devoir t’instruire de cette circonstance.

— Il n’importe ; mais Jean a su aussi de M. Billaud-Varenne que celui-ci avait dit à mon père : — « Puisque vous tenez tant à donner votre fille en mariage à un bon républicain, que ne la donnez-vous à Jean Lebrenn ? Il a été, dites-vous, votre élève : il jouit de l’estime et de l’amitié des hommes les plus éminents de la révolution. »

— Plus de doute, ton père ne me le cachait pas, il espérait, en te mariant à M. de Saint-Just…

—… Se créer ainsi une puissante sauvegarde contre les dangers qu’il redoute ; mais M. de Saint-Just n’ayant pas accepté cette alliance, et M. Billaud-Varenne proposant Jean Lebrenn pour gendre à mon père, il a craint de paraître mépriser un artisan en lui refusant ma main.

— Et de plus il a compté trouver dans M. Lebrenn l’appui qu’il avait recherché dans M. de Saint-Just ?

— Oui, ma mère, et c’est ainsi que Jean a compris pourquoi mon père donnait aussi subitement son consentement à notre mariage, et pourquoi il exigeait une discrétion absolue au sujet du passé, notamment envers M. Billaud-Varenne.

— Et qu’a pensé M. Lebrenn de la conduite de ton père en cette circonstance ?