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son manifeste en demandant à marcher sur Versailles. Partout le peuple s’arme ; on pourchasse les cocardes blanches et les cocardes noires (autre signe de ralliement royaliste), et, justes représailles, elles sont foulées aux pieds. Partout le peuple se rassemble, se consulte sur l’imminence du danger. On tient conseil dans le jardin du Palais-Royal, au faubourg Saint-Antoine, au bout des ponts, sur les quais. On se dit que la hardiesse des aristocrates croît à vue d’œil ; que le bateau chargé de farines, qui arrivait de Corbeil matin et soir, n’arrive plus que tous les deux jours… La cour veut donc prendre Paris par la famine ?… On se dit que, malgré les ordres de l’Assemblée, les parlements donnent toujours signe de vie… que celui de Toulouse brûle des brochures patriotiques ; que celui de Rouen décrète de prise de corps des citoyens absous par l’Assemblée… que celui de Paris enregistre et s’opiniâtre à se servir de sa formule gothique : Louis, par la grâce de Dieu, et tel est notre bon plaisir… On se dit, enfin, qu’il se tient des conciliabules dans les hôtels des aristocrates, et qu’on enrôle clandestinement pour la cour. »

Loustalot, hardi jeune homme, généreux cœur, noble caractère, et l’un des plus brillants esprits de ce temps, écrit de son côté dans son journal, les Révolutions de Paris (no XIII) :

« — Il faut un second accès de révolution, disions-nous il y a quelques jours ; tout s’y prépare. L’âme du parti aristocratique n’a pas quitté la cour ! Une foule de chevaliers de Saint-Louis, d’anciens officiers, de gentilshommes et d’employés déjà compris dans les réformes, ou qui vont l’être, ont signé un engagement de se joindre aux gardes du corps et autres. Ce registre contient déjà plus de trente mille noms. Le projet de la cour est de conduire le roi à Metz et d’y attendre le secours des étrangers, pour entreprendre la guerre civile et exterminer la révolution ! ! »

Enfin, Marat, dans l’Ami du peuple (4 octobre 1789), donne les conseils suivants, avec cette promptitude de décision, cette sagacité