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Il est des événements d’une si imposante majesté, que la plus admirable éloquence, la possédât-on, serait impuissante à les peindre : il faut laisser la parole aux faits, leur mâle simplicité a quelque chose d’auguste.

Lisez, fils de Joël, lisez avec un religieux recueillement ce simple procès-verbal de quelques lignes, relatant la première et immortelle séance de la Convention nationale.


« La Convention s’assemble et siège au palais des Tuileries, vendredi, 21 septembre, à midi un quart.

» Président : Pétion ; secrétaires : Condorcet, Brissot, Rabaud-Saint-Étienne, Vergniaud, Camus, Lassource.

» couthon, à la tribune : — Citoyens, notre mission est sublime ! Le peuple nous a témoigné sa confiance, rendons-nous-en dignes ! Je ne crains pas que dans la discussion qui va s’ouvrir l’on ose reparler de la royauté : elle ne convient qu’aux esclaves ! Les Français seraient indignes de la liberté qu’ils ont conquise, s’ils conservaient une forme de gouvernement marquée par quatorze siècles de crimes.

» collot-d’herbois. — Il est une délibération que vous ne pouvez remettre à demain, que vous ne pouvez remettre à ce soir, que vous ne pouvez différer un seul instant sans être infidèles au vœu de la nation : c’est l’abolition de la royauté.

» grégoire. — Certes, personne de nous ne proposera jamais de conserver en France la race funeste des rois ; nous savons trop bien que toutes les dynasties n’ont jamais été que des races dévorantes ; mais il faut pleinement rassurer les amis de la liberté ; il faut détruire ce royal talisman, dont la force magique serait encore propre à stupéfier bien des hommes ; je demande donc que, par une loi solennelle, vous consacriez l’abolition de la royauté ! »