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preuve de civisme de ces enfants, plusieurs des commissaires envoyés aux prisons rentrent dans la salle, accompagnés de Tallien, membre de la commune ; il reste à la barre, les représentants du peuple regagnent leurs sièges. Je ne m’attendais pas à ce que le retour des commissaires causât une profonde sensation parmi leurs collègues : tous connaissaient déjà les déplorables événements de la journée par la rumeur publique ; mais je fus frappé de l’espèce d’indifférence de l’Assemblée. Elle ne semblait désirer d’entendre le rapport de ses délégués qu’afin de clore précipitamment ce lugubre incident.

« — Citoyens, — dit Dussaulx à la tribune, — tous nos efforts ont été vains, nous n’avons pu arrêter l’essor de la vengeance populaire ; la plupart des prisons sont maintenant vides. Environ quatre cents prisonniers ont péri à la prison de la Force, où je me suis transporté ; j’ai cru devoir faire sortir les prisonniers pour dettes, qui avaient été épargnés. Le peuple s’était d’abord porté à l’Abbaye ; il a demandé aux gardiens le registre de l’écrou : les prisonniers détenus pour l’affaire du 10 août ont péri sur-le-champ ; onze seulement ont été sauvés. »

Le rapport de Dussaulx est écouté avec un morne silence, les tribunes étaient presque entièrement dégarnies ; le drame, ce jour-là, était ailleurs qu’à l’Assemblée.

Tallien, toujours à la barre, demande la parole et dit :

« — Citoyens, les commissaires de la commune ont été impuissants à conjurer la vengeance du peuple, vengeance juste, en quelque sorte, car, nous devons le dire, ses coups ont frappé des fabricateurs de faux assignats, que la loi condamne à mort. Ce qui a excité la vengeance du peuple, c’est qu’il n’y avait dans les prisons que des scélérats reconnus !

» bazire. — J’ai à mentionner des faits importants pour l’honneur du peuple ; les exécuteurs faisaient la visite des cadavres et déposaient l’argent et les portefeuilles dans les mains du concierge