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— Et nos pères, nos maris, nos fils, nos frères s’enrôlent en masse pour courir aux frontières ? — s’écrie une femme avec épouvante, — qui nous défendra contre la fureur de ces ennemis intérieurs dont parle le placard ?

— Les scélérats ! ils déchaîneront dans Paris les brigands des prisons !

— N’a-t-on pas, avant-hier, entendu un galérien mis au carcan s’écrier : — « Vivent les Prussiens ! nos libérateurs ! — Vive le roi ! vive la reine ! »

— Misère de Dieu ! pendant que nous serons aux frontières, des bandits pilleront nos boutiques, violeront, égorgeront nos femmes et nos filles…

— Malheur à nous !

— Que faire ? que faire ? Ah ! si nos ennemis n’étaient qu’à la frontière !

— Mais, partir en laissant derrière soi femmes, enfants, vieillards, exposés sans défense à la rage de nos ennemis… Oh ! c’est affreux.

— Et cependant si nous n’allons combattre les armées étrangères, si elles arrivent devant Paris et qu’elles le prennent, la ville, traitée en place conquise, sera livrée à toutes les horreurs de la guerre. N’avez-vous pas lu le manifeste de Brunswick ? Ah ! malheur à nous ! que faire ? que faire ?

— Que faire, citoyens ? — s’écrie soudain une voix. — L’ami du Peuple nous le dit ce qu’il faut faire.

— Quoi ? que dit-il ? que dit-il ?

— Écoutez la lecture de ce placard que Marat vient de faire afficher.

— Silence ! écoutons, écoutons !

Le silence se rétablit, et j’entends lire ce qui suit :