Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 14.djvu/191

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« — Moi aussi je jure de maintenir l’égalité… la liberté… ou de mourir à mon poste… Oui, je le jure ! Nous saurons défendre la révolution ! La nation française, lasse du despotisme, l’a faite cette révolution… mais la nation trop généreuse a transigé avec ses tyrans ! L’expérience l’a prouvé, citoyens, il n’est aucun retour à espérer des anciens oppresseurs du peuple !… (Applaudissements enthousiastes dans les tribunes. Consternation dans la loge royale.) — La nation va rentrer dans la plénitude de ses droits… mais en tous temps… et surtout lorsqu’il s’agit de crimes individuels… là où commence l’action de la justice… là doit cesser la vengeance populaire… (Applaudissements dans les tribunes.) Je prends devant l’Assemblée nationale et sur ma tête l’engagement de protéger la vie des personnes qui sont dans cette enceinte, — ajouta Danton désignant du geste la loge royale. — Ces personnes appartiennent dès à présent à la justice… dont je suis ministre. »

Danton, après ces terribles paroles, descend de la tribune au milieu d’un profond silence qui porte à son comble l’effroi de la famille royale… Ce silence est celui de juges qui témoignent de leur respect pour la position des accusés. Cette muette émotion durait encore lorsque Pétion, maire de Paris, est introduit à la barre.

« le président. — Le maire de Paris a la parole.

» pétion, à la barre. — L’effervescence du peuple se calme… mais il entend avoir justice des coupables… quels qu’ils soient ! Il montre, comme toujours, son horreur du vol, en faisant main-basse sur les pillards qui se sont introduits aux Tuileries pendant l’incendie… Je viens d’arracher à une mort certaine l’un de ces misérables… en le mettant sous le coup de la loi… Le peuple a écouté ma voix… partout les décrets de l’Assemblée sont respectés. Le peuple se repose sur vous, législateurs, pour la punition légale des coupables ; mais ne trompez pas son attente… Non ! ne trompez pas la foi qu’il a dans votre justice. Cette foi peut seule, je vous en préviens, désarmer la juste vengeance po-