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demandez depuis si longtemps ; je la mets aussi aux pieds de M. Bailly et de son drapeau rouge ; je sens que ma voix est trop faible pour s’élever au-dessus de vos trente mille mouchards et d’autant de vos satellites, au-dessus du bruit de vos quatre cents tambours et de vos canons…

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» … Vous et vos complices de l’Hôtel de Ville et de l’Assemblée, vous redoutiez l’émission des vœux du peuple de Paris qui vont bientôt devenir ceux de la France entière ; vous redoutiez votre jugement prononcé par la nation en personne, séante en son lit de justice… au champ de Mars ! Comment faire ? vous êtes-vous dit…

» — Hé… appelons à notre aide la loi martiale !

» — Bon… mais le moyen de l’invoquer, cette loi terrible contre des pétitionnaires tranquilles et sans armes, qui usent paisiblement du droit de réunion ?

» Or, voilà ce qu’imaginent les constitutionnels, afin de nous gratifier une seconde fois de la loi martiale, et, au lieu de faire pendre un homme (comme le boulanger François), ils en font massacrer deux. »

(Ici Camille Desmoulins raconte l’arrestation des deux individus trouvés dans la matinée cachés sous l’autel de la Patrie et continue).

«… Les mouchards, les bandits apostés, contrefont les patriotes exagérés, se jettent sur ces deux malheureux, les mettent en pièces, leur coupent la tête, qu’ils vont promener dans Paris.

» On voulait préparer ainsi les citoyens par l’horreur de ce spectacle à supporter la loi martiale. Aussitôt se répand dans la cité, avec la rapidité de l’éclair, cette nouvelle : qu’on a coupé deux têtes au champ de Mars ! Donc, haro sur les pétitionnaires, les jacobins et les cordeliers. Voici les municipaux enchantés. »

(Ici Camille Desmoulins oublie ou passe sous silence un fait honorable pour la minorité du conseil de la commune de Paris. Les trois municipaux de retour du champ de Mars, apprenant la procla-