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— Oui, ma nièce, — reprend M. Hubert, — votre père vient de refuser positivement votre main à M. Jean Lebrenn… Ce mariage est… et sera toujours impossible.

— Mon père, avez-vous pris cette résolution ?

— Ma fille, des raisons, qu’il est inutile de vous faire connaître, s’opposent, en effet, à ce mariage…

— Ces raisons atteignent-elles, en quoi que ce soit, l’honneur, la probité, la conduite de M. Jean Lebrenn ? — demande la jeune fille d’une voix ferme. — Je vous adjure, mon père, de me répondre !…

— M. Jean Lebrenn est un parfait honnête homme : je lui dois cette justice, quoique j’abhorre ses opinions politiques, — dit M. Hubert, devançant toujours les réponses plus ou moins embarrassées de son beau-frère ; — mais M. l’avocat Desmarais ne peut donner, ne donnera jamais sa fille en mariage à un garçon serrurier… Telle est, ma nièce, la vérité…

— Ainsi, mon père, votre refus n’a pas d’autre cause que l’inégalité de condition qui existe entre M. Lebrenn et moi ?…

— Il ne s’agit point d’inégalité de condition, — reprend M. Desmarais. — Ce mariage, je vous l’ai dit, ma fille, est impossible à cause de… de… enfin… pour diverses raisons…

— Mais, encore une fois, mon père, ces raisons n’entachent en rien l’honneur de M. Lebrenn ?

— Non, sans doute ; mais…

— Ainsi, mon père, vous rendez pleinement justice aux qualités, au caractère de M. Jean Lebrenn ? vous le reconnaissez pour un parfait honnête homme ?

— Eh ! certainement, ma fille ; mais il est malheureusement des nécessités qui…

— Monsieur Jean Lebrenn, — dit Charlotte en s’avançant vers le jeune artisan et lui tendant la main par un geste rempli de grâce et de dignité, — en présence de Dieu, qui me voit et m’entend, vous