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un jour plus heureux que celui où M. Lebrenn vous est rendu après de si cruelles souffrances, — dit Frantz de Gerolstein, s’inclinant avec respect devant madame Lebrenn ; — votre tendresse, celle de ses enfants, feront oublier à notre pauvre martyre les maux qu’il a endurés, — ajoute le prince, se tournant vers le vieillard aveugle ; puis, le contemplant avec une commisération profonde, il ajoute : — Ah ! monsieur Lebrenn, après de si douloureuses épreuves… vous trouverez une généreuse consolation dans cette pensée : que vous et vos compagnons de captivité… vous aurez été du moins les dernières victimes d’un despotique arbitraire !!… Croyez-moi, la prise de la Bastille est le premier des coups qui renverseront la monarchie ; oui, bientôt viendra ce beau jour prédit par Victoria-la-Grande à notre aïeul Scanvoc’h le soldat… Jour glorieux !… jour de réparation, jour d’affranchissement où la vieille gaule fédérale, brisant le double joug, de l’Église et de la royauté, aura reconquis son antique gouvernement républicain !

— J’espère, comme vous, le prochain avénement de ce grand jour, monsieur de Gerolstein, — reprend le vieil aveugle, — et ainsi que vous, je crois que la victoire remportée par le peuple en ce jour a sonné le glas funèbre du pouvoir des prêtres et des rois !

— Frantz… voici mon frère, de qui je vous ai souvent entretenu, — dit Victoria prenant la main de Jean et la mettant dans celle du prince ; — vous êtes parents, soyez amis ; vous êtes dignes l’un de l’autre…

— Mon cher Jean… car ainsi l’on doit se traiter entre amis et parents du même âge, — reprend Frantz de Gerolstein avec une cordiale familiarité en serrant affectueusement dans sa main celle du jeune artisan, — je savais par votre sœur tout le bien que l’on doit penser de vous… je vous connaissais déjà pour l’un des plus vaillants de cette vaillante journée, c’est vous dire combien je suis heureux de notre rencontre.

— Moi aussi, mon cher Frantz, je suis heureux de trouver en