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— Certainement, la mère Lebrenn occupe deux chambres au quatrième étage de la maison no 17, là où est entrée la belle jeune femme qui a quitté son canon… pour aider ce brave Jean à soutenir son pauvre père aveugle… qui a sans doute monté chez lui !

— Je vous remercie ma chère dame, — répond le jésuite cachant à peine la surprise et la joie sinistre que lui cause cette découverte inattendue.

— Enfin ! — se disait l’abbé, — je la retrouve cette trace perdue pour nous depuis plus d’un siècle… la trace de ces forcenés Lebrenn signalés à la surveillance de notre Compagnie par saint Ignace de Loyola lui-même ! en raison de leur pestilentielle légende de famille… ces Lebrenn, parents de ce Rennepont… de qui l’énorme héritage doit tomber entre nos mains… Quelle découverte… ô Providence ! !

— Doux parrain, — dit en ce moment à l’abbé le petit Rodin d’un air déterminé, — je n’ai plus peur de voir couper le cou à un homme, moi ! !

— Mon enfant, — répond le jésuite d’un air paterne et béat, — il faut non-seulement ne point avoir peur… mais se sentir le cœur extrêmement allègre… lorsqu’on voit mettre à mort un ennemi de notre sainte et douce mère l’Église de Rome.

— Doux parrain, M. de Flesselles était donc un ennemi de notre sainte et douce mère l’Église de Rome ? — demande le petit Rodin en se signant dévotement. — C’est donc pour ça que Lehiron lui a coupé la tête ?

— Mon enfant, la mort de M. de Flesselles, innocent ou coupable, était utile à la bonne cause… — reprend l’abbé au moment où la bande de Lehiron criait de nouveau en passant sous les fenêtres de l’avocat Desmarais :

— À mort les ennemis du peuple ! — À mort les bourgeois ! — À la lanterne Desmarais, c’est un faux frère ! — C’est un traître ! !

Ces cris n’étaient pas tout d’abord parvenus aux oreilles de l’avocat, et à peine quittait-il le balcon afin de rentrer dans son salon avec