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qu’aujourd’hui… Vous m’avez, Dieu me damne… ensorcelé ! !… Votre empire sur moi m’épouvanterait, si vous n’étiez la noble femme que vous êtes… Tenez… voulez-vous que je vous fasse un aveu ?…

— Oh ! dites… dites…

— Foi de gentilhomme, et cela est horrible à confesser… oui, foi de gentilhomme, vous m’auriez poussé à la félonie aussi facilement, je crois, que vous m’avez affermi dans la voie loyale que je suis… Que vous dirai-je ? vous m’avez affolé à ce point… que, pour être aimé de vous, j’aurais… et j’en frémis… j’aurais trahi mon roi, ma foi… et odieusement entaché l’honneur de mon blason… ainsi que l’a fait le colonel de Plouernel, dont je ne prononce le nom que la rougeur au front…

Puis, tombant aux genoux de la marquise, le comte ajoute d’une voix palpitante : — Dis… est-ce assez d’amour… Victoria… est-ce assez d’amour ?…

— Non, ce n’est pas assez… Gaston !… non, ce n’est pas assez d’amour… Jamais… entendez-vous… jamais… si excessives que soient les preuves de votre amour… il n’égalera l’ardente et folle passion que vous m’avez inspirée… — répond la jeune femme avec un tel accent, un tel regard que M. de Plouernel saisit et couvre de baisers la main de Victoria… Mais soudain il entend frapper à la porte du salon.

— Relevez-vous, comte, — dit vivement la jeune femme, — c’est quelqu’un de vos gens…

M. de Plouernel se relève avec dépit et s’écrie impatiemment :

— Qui est là ?…

— Moi, Robert, monseigneur.

— Entrez.

L’intendant entre précipitamment, tenant à la main une dépêche et dit à son maître :

— Un courrier venant du château de Versailles apporte cette dépêche pour monseigneur. Ce courrier a eu les plus grandes peines à