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frère jeta complétement le masque et, entrant en révolte ouverte contre son roi, répondit à Brezé : « — Allez dire à votre maître que nous sommes ici par la volonté du peuple, et que nous ne quitterons cette salle que par la force des baïonnettes !… »

victoria. — Ah ! dans sa furie révolutionnaire, votre frère, monsieur le vicomte, indiquait naïvement au pouvoir royal son infaillible moyen de salut : la force des baïonnettes ; oui, devant elles, cette tourbe couarde et criarde se fût à l’instant dissipée… elle l’avouait elle-même !! Par le sang du Christ ! est-ce qu’il en manquait de baïonnettes à Versailles ? Et cependant qu’a fait Louis XVI ? A-t-il profité de l’avis échappé à l’audacieux tribun ? A-t-il, cette fois du moins, saisi l’occasion suprême peut-être… d’écraser ces factieux ? Non ! Ce prince a commis une nouvelle lâcheté… une nouvelle trahison, un nouveau crime contre la royauté… dont il est représentant responsable et incarné, aux yeux des hommes et de Dieu… Les rebelles, encouragés par l’impunité, ont redoublé d’audace, et je ne sais plus quel bourgeois, du nom de Camus, je crois… faisait décréter séance tenante…

le marquis, riant. — Hi, hi, hi… Camus. Ah ! que voilà donc un nom digne sans doute du polisson qui le porte. Ah, ah, ah !… Camus !! Inclinez-vous donc devant les décrets souverains de mons Camus… Il doit être fils de cette fameuse mère Camus qui… hi, hi, hi…

victoria. — La raillerie est d’autant plus de saison, monsieur le marquis, que le décret de… mons Camus, confirmant les actes des factieux, fut voté, non seulement par le tiers état, mais par une fraction de l’ordre de la noblesse, complice de cet infâme duc d’Orléans, et par plusieurs membres du clergé, dociles aux suggestions de cet apostat de Talleyrand, évêque d’Autun… Enfin, et je vous demande pardon, monsieur le vicomte, de raviver une blessure toujours saignante, mais l’inviolabilité de l’Assemblée fut votée sur la motion de votre frère…