Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 13.djvu/116

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sibles, appartenant à toutes les prétendues classes de la société, des plus hautes aux plus humbles ! Nous nous sommes ainsi créé, par l’unique attraction de la vérité, des partisans ou des intelligences occultes jusque dans le conseil des rois… jusqu’au sein du palais des papes… Nos éternels ennemis sont, à leur insu, constamment sous nos yeux ; leurs trames nous sont dévoilées ; quelques unes de leurs créatures les plus dévouées, en apparence, obéissent à nos ordres, sapent souterrainement les bases de ces antiques édifices de l’oppression des hommes ; d’innombrables écrits préparent, accélèrent le mouvement des esprits ; de sorte qu’à l’heure solennelle des revendications légitimes, si les maîtres du vieux monde répondent par le dédain, la ruse ou la menace à l’appel pacifique de la voix du peuple ; s’ils lui refusent le souverain exercice de ses droits sacrés, imprescriptibles, dont il est dépouillé depuis tant de siècles, l’Église et la monarchie, souterrainement minées de toutes parts, s’écrouleront à notre première attaque, ensevelissant sous leurs débris les prêtres, les nobles et les rois ![1] » Et maintenant, femme… — poursuit l’initiateur, étendant la main vers Victoria Lebrenn, — tu connais ce que tu dois connaître de nos projets. Ils sont immenses, comme nos moyens d’action. Une cotisation annuelle de tous nos frères, qui se nombrent par millions, nous rend maîtres d’un trésor considérable… Telle est la source cachée de l’apparente opulence dont jouissent ceux des nôtres qui, pour servir nos projets, fréquentent les puissants du jour, luttent avec eux de folles prodigalités, partagent leurs plaisirs, leurs dissipations et, au besoin, leurs orgies, pénètrent ainsi dans leur intimité, surprennent enfin les secrets desseins de ces castes au sujet des graves conjonctures où nous sommes, car les privilégiés s’attendent à une lutte prochaine, dont l’ouverture des États généraux sera le signal… Il est pénible de recourir à ces ruses, à ces déguisements de l’âme, pour combattre

  1. Robinson, Preuves de la conspiration contre toutes les religions et tous les gouvernements de l’Europe, t. Ier.