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CHAPITRE VII.


Pourquoi madame Lebrenn et mademoiselle Velléda sa fille n’avaient pas une haute opinion du courage de Gildas Pakou, le garçon de magasin. — Comment Gildas, qui ne trouvait pas le quartier Saint-Denis pacifique ce jour-là, eut peur d’être séduit et violenté par une jolie fille, et s’étonna fort de voir certaines marchandises apportées dans la boutique de l’Épée de Brennus.




Pendant que M. Lebrenn avait eu avec M. de Plouernel l’entretien précédent, la femme et la fille du marchand occupaient, selon l’habitude, le comptoir du magasin.

Madame Lebrenn, pendant que sa fille brodait, vérifiait les livres de commerce de la maison. C’était une femme de quarante ans, d’une taille élevée ; sa figure, à la fois grave et douce, conservait les traces d’une beauté remarquable ; il y avait dans l’accent de sa voix, dans son attitude, dans sa physionomie, quelque chose de calme, de ferme, qui donnait une haute idée de son caractère ; en la voyant on aurait pu se rappeler que nos mères avaient part aux conseils de l’État dans les circonstances graves, et que telle était la vaillance de ces matrones, que Diodore de Sicile s’exprime ainsi :

« Les femmes de la Gaule ne rivalisent pas seulement avec les hommes par la grandeur de leur taille, elles les égalent par la force de l’âme. » Tandis que Strabon ajoute ces mots significatifs : « Les Gauloises sont fécondes et bonnes éducatrices. »

Mademoiselle Velléda Lebrenn était assise à côté de sa mère. En voyant cette jeune fille pour la première fois, l’on restait frappé de sa rare beauté, d’une expression à la fois fière, ingénue et réfléchie ;