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Aussi, je me disais : Il y a quelque chose comme un air de famille.

— Vous trouvez ?

— Je le trouve, monsieur… pardon de la liberté grande…

— N’allez-vous pas vous excuser ?… Pour Dieu ! ne soyez donc pas ainsi toujours formaliste, mon cher… Je vous disais donc que dans ces tournois il y avait ce qu’on appelait la reine de beauté ; elle distribuait les prix au vainqueur… Eh bien, il faut que ce soit votre charmante fille qui soit la reine de beauté du carrousel que je veux donner… elle en est digne à tous égards.

— Ah ! monsieur, c’est trop, non, c’est trop. Et puis ne trouvez-vous point que pour une jeune fille… être comme cela… en vue… et au vis-à-vis de messieurs vos dragons… c’est un peu… pardon de la liberté grande… mais un peu… comment vous dirai-je cela ?… un peu…

— N’ayez donc pas de ces scrupules, cher monsieur Lebrenn ; les plus nobles dames étaient autrefois reines de beauté dans les tournois, elles donnaient même un baiser au vainqueur.

— Je conçois… elles avaient l’habitude… tandis que ma fille… voyez-vous… dame… ça a dix-huit ans, et c’est élevé… à la bourgeoise…

— Rassurez-vous ; je n’ai pas un instant songé à ce que votre charmante fille donnât un baiser au vainqueur.

— Voire ! monsieur… que de bontés !… et si vous daignez permettre que ma fille n’embrasse point…

— Mais cela va sans dire, mon cher… Que parlez-vous de ma permission ? je suis déjà trop heureux de vous voir accepter mon invitation, ainsi que votre aimable famille.

— Ah ! monsieur, tout l’honneur est de notre côté.

— Pas du tout, il est du mien.

— Nenni, monsieur, nenni ! c’est trop de bonté à vous. Je vois bien, moi, l’honneur que vous voulez nous faire.

— Que voulez-vous, mon cher, il y a comme cela des figures…