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était surmonté de l’emblème de la Gaule : un coq doré, aux ailes à demi ouvertes ; aux côtés du chef chevauchaient un barde et un druide, vêtus de longues robes blanches rayées de pourpre ; ils ne portaient pas d’armes ; mais, la bataille engagée, dédaigneux du péril, au premier rang des combattants, ils les encourageaient par leurs paroles et par leurs chants de guerre. Ainsi chantait le barde au moment où passait devant nous le chef des cent vallées :

« César est venu contre nous. — Il nous a demandé d’une voix forte : Voulez-vous être esclaves ? êtes-vous prêts ?… — Non, nous ne voulons pas être esclaves… non, nous ne sommes pas prêts. — Gaulois, enfants d’une même race, unis par la même cause, levons notre étendard sur les montagnes, et précipitons-nous dans la plaine. — Marchons… marchons à César, unissons dans un même carnage lui et son armée… Aux Romains !… aux Romains ! »

Et tous les cœurs battaient vaillamment à ces chants du barde.

En passant devant notre tribu, à la tête de laquelle était Joel, mon père, le chef des cent vallées arrêta son cheval et dit :

— Ami Joel, lorsque j’étais ton hôte, tu m’as demandé mon nom : je t’ai répondu que je m’appellerais Soldat tant que notre vieille Gaule ne serait pas délivrée de ses oppresseurs… L’heure est venue de nous montrer fidèles à la devise de nos pères : Dans toute guerre il n’y a que deux chances pour l’homme de cœur : vaincre ou périr. Puisse mon dévouement à notre commune patrie n’être pas stérile !… Puisse Hésus protéger nos armées !… Peut-être alors le chef des cent vallées aura-t-il effacé la tache qui couvre un nom qu’il n’ose plus porter… Courage, ami Joel ! les fils de ta tribu sont braves entre les braves… J’ai vu dans ta maison deux des tiens, Julyan et Armel, se battre après souper par outrevaillance… Ta sainte fille Hêna, la vierge de l’île de Sên, a offert son sang à Hésus… Brave donc est ta tribu, ami Joel… Quels coups ne va-t-elle pas frapper, aujourd’hui qu’il s’agit du salut de la Gaule ?…

— Ma tribu frappera de son mieux et de toutes ses forces, comptes-y,