Page:Stuart Merrill - Prose et vers (1925).pdf/209

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

PRÉFACE POUR HENRI DEGRON

Théodore de Banville louait jadis Henri Heine de ce qu’avec « la rose, le lis, la colombe, le soleil et le rossignol, c’est-à-dire de quoi faire le plus assommant et le plus plat des volumes de vers », il sût composer des chansons de musique inouïe et de nouvelle passion.

J’adresserais volontiers pareil éloge à Henri Degron, sans autrement forcer sa modestie en le comparant, lui, si gentiment sentimental, à un poète qui feignit de croire moins à ses bonnes larmes qu’à son mauvais sourire. Henri Degron est un simple. À une époque récente où ses frères en poésie couraient l’aventure, casqués et cuirassés, sur les grandes routes de la Légende, ou évoquaient, parmi les pentacles, les ombres de la Muse noire, ou murmuraient au crépuscule parfumé de pavots leur dégoût prématuré de la vie, Henri Degron se délassait, lyrique enfant, à faire l’école buissonnière dans le pays boisé de Crespières, où il apprit des sources hantées de naïades, et des oiseaux en qui s’est incarnée l’âme de Philomèle l’art sacré de chanter sa peine ou sa joie, selon le rythme éternel de la Nature.