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c’était ce même agent secret avec qui j’ai déjeuné sur la route d’Aylesbury !

— Vous êtes sûr de ne pas vous être trompé ? demandai-je.

— Sûr et certain ! répondit-il. Ce n’était pas le fameux Lavender, vous entendez bien ? mais l’autre homme, celui que j’ai vu avec lui ! Qu’est-ce qu’il faisait là ? Tout ça a l’air louche ! »

J’en convins volontiers.

Je me promenai de long en large dans mon appartement. Après tout, ce limier de Bow Street pouvait s’être trouvé là par hasard ; mais c’était vraiment une coïncidence bien singulière, que cet homme, que Rowley avait rencontré au Dragon vert, dans la banlieue d’Aylesbury, fût à présent en Écosse, et qu’il s’attardât sur la porte de la banque où une somme était déposée au nom de Rowley !

« Dites donc. Rowley ! m’écriai-je, il ne vous a pas vu, au moins ?

— Oh ! soyez sans crainte ! dit Rowley. Hé ! monsieur Anne, s’il m’avait vu, c’est vous qui ne m’auriez pas revu ! Je ne suis pas un âne, monsieur !

— Eh bien ! mon garçon, vous pouvez mettre ce reçu dans votre poche ! Vous n’aurez pas à en faire usage avant d’être tout à fait délivré de moi. Mais ne le perdez pas, au moins ! Ce sera votre part du fameux portefeuille : 800 livres pour vous tout seul !

— Je vous demande pardon, monsieur Anne ; mais pour quoi faire ? demanda Rowley.

— Pour monter une taverne, si vous voulez ! dis-je.

— Avec votre permission, monsieur, répondit-il aigrement, je n’ai pas du tout l’intention de monter une taverne. Je suis votre domestique, attaché à votre personne, monsieur Anne, et rien d’autre !

— En ce cas, Rowley, dis-je, je vais vous expliquer pourquoi je vous donne cet argent. C’est, par exemple, pour vous remercier du service que vous venez de me rendre à l’instant. C’est pour récompenser votre loyauté et