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PRINCE ERRANT

part, quoique vous soyez parfaitement dans le vrai en supposant que je sois mêlé aux questions politiques, je suis tout à fait incompétent, tant par caractère que par intelligence, pour y jouer un rôle de chef. La nature, je le crains, n’a voulu faire de moi qu’un subalterne. Et pourtant nous avons tous quelque chose à quoi commander, quand ce ne serait qu’à notre humeur, Monsieur Fritz, et un homme qui songe à se marier doit s’observer de près : la position du mari, comme celle du prince, est tout artificielle : dans l’une comme dans l’autre, il est difficile de bien faire. Suivez-vous le raisonnement ?

— Oui, certes, je suis le raisonnement, répondit le jeune homme, tout penaud et fort déconcerté par le genre de renseignements qu’il avait obtenu. Mais, se ranimant : — Est-ce pour en faire un arsenal, demanda-t-il, que vous avez acheté la ferme ?

— Nous verrons, répondit en riant le prince. Ne montrons pas trop de zèle ; en attendant, si j’étais vous, je ne soufflerais mot là-dessus.

— Oh ! pour cela, ayez confiance, Monsieur ! s’écria Fritz en empochant un écu. Quant à vous, vous n’avez rien dit… du premier coup je soupçonnais ce qu’il en était ; je pourrais même dire que j’en étais sûr. Rappelez-vous, ajouta-t-il, si l’on a besoin d’un guide, que je connais, moi, tous les sentiers de la forêt.

Othon, seul de nouveau, poursuivit son chemin en riant à part lui. Cette conversation avec Fritz l’avait immensément amusé. Il n’était pas non plus mécontent de sa conduite à la ferme. Bien des