Page:Stevenson - Le Roman du prince Othon.djvu/192

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
176
LE ROMAN DU PRINCE OTHON

— Me menacerais-tu, par hasard, ami Othon ? Ce serait là une jolie conclusion.

— Quand m’avez-vous jamais vu employer mon pouvoir au profit d’une animosité privée ? s’écria Othon. Adressées à un simple particulier, vos paroles seraient une insulte impardonnable, mais sur moi il vous est facile de lancer vos traits en toute sécurité. Je devrais même, vraiment, m’arrêter à vous faire compliment de votre rude franchise. Je vous dois plus que le pardon, je vous dois mon admiration, pour le courage que vous déployez en bravant ce… ce formidable monarque, comme un Nathan devant David. Mais, Monsieur, vous venez de déraciner, sans merci aucune, une vieille affection. Vous me laissez bien dénué, en vérité… Mon dernier lien est brisé. J’en atteste le ciel, pourtant, j’ai essayé de bien faire. Et voilà ma récompense : je me trouve seul ! Je ne suis pas un galant homme, dites-vous ? Mais c’est vous pourtant qui avez pu, en tout ceci, trouver de quoi ricaner ! Et, bien qu’il me soit clair comme le jour maintenant où vos sympathies ont été se loger, moi je vous en épargnerai la raillerie.

Gotthold bondit. — Othon, êtes-vous fou ? s’écria-t-il. Parce que je vous demande d’où proviennent certaines sommes, et parce que vous refusez…

— Monsieur de Hohenstockwitz, dit Othon, j’ai cessé de désirer votre aide en mes affaires. J’en ai entendu assez et vous avez suffisamment foulé ma vanité aux pieds. Que je ne sache pas gouverner, que je ne sache pas aimer, c’est fort possible, vous me le répétez avec toutes les apparences de la sincérité. Mais Dieu m’a accordé une vertu : je sais