Page:Stevenson - Le Roman du prince Othon.djvu/163

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
147
DE L’AMOUR ET DE LA POLITIQUE

une prescription aussi vieille que l’histoire du monde, à l’alliance et à l’aide actif de la Fortune, cette déesse ponctuelle descendit de sa machine.

Une des dames de la princesse demanda à entrer : un homme, à ce qu’il paraissait, avait apporté un billet pour le baron de Gondremark. C’était un mot écrit au crayon, et que l’ingénieux Greisengesang avait trouvé moyen de griffonner et de faire sortir sous les batteries mêmes d’Othon. La hardiesse de l’acte témoignait de l’épouvante de son acteur. Car un seul motif avait le pouvoir d’influencer Greisengesang : la peur.

Le billet était ainsi conçu :


« Au prochain Conseil, la procuration sera rétractée.

 » Corn. Greis. »


Ainsi, après trois ans de jouissance, le droit de signature allait être enlevé à Séraphine ! C’était plus qu’une insulte, c’était une disgrâce publique. Elle ne s’arrêta pas à considérer combien elle l’avait méritée, mais bondit sous l’attaque, comme bondit le tigre blessé.

— C’est bien, dit-elle, je signerai l’ordre. Quand partira-t-il ?

— Il me faudra douze heures pour réunir mes hommes, et il vaut mieux que la chose se passe de nuit. Demain, donc, à minuit, si c’est votre bon plaisir, répondit le baron.

— Parfait, dit-elle. Baron, ma porte reste toujours ouverte pour vous : sitôt l’ordre rédigé, apportez-le pour ma signature.

— Madame, dit-il, vous seule, de nous tous, ne