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— Ha ! dis-je, vous ne savez donc plus d’anglais ?

— Non, me répondit-il impudemment.

Tout bouillant de fureur, je m’élançai en levant la main pour le frapper.

Lui, il tira de dessous ses guenilles un couteau, et se sauva à reculons, en me montrant les dents comme un chat sauvage.

Alors oubliant tout, excepté ma colère, je courus sur lui. Je détournai de ma main gauche son couteau, et de ma main droite je le frappai à la bouche.

J’étais fort pour mon âge et très en colère : lui, il était petit, et il tomba lourdement devant moi.

Par bonheur, son couteau lui échappa des mains dans sa chute.

Je le ramassai ainsi que ses brogues. Je souhaitai le bonjour à l’homme, que je laissai nu-pieds et désarmé.

Je me frottai les mains en m’en allant, sûr d’en avoir fini avec ce gredin, et enchanté de cette conclusion pour une foule de raisons.

D’abord il savait qu’il n’aurait pas un sou de moi ; ensuite les brogues, en ce pays-là, ne valaient que quelques pence, et enfin le couteau était en réalité un poignard, et le port lui en était interdit par la loi.

Environ une demi-heure après, je me trouvai près d’un homme de haute taille, en guenilles, qui marchait très vite, mais en tâtant le terrain avec un bâton.

Il était tout à fait aveugle et me dit qu’il était catéchiste, ce qui eût dû me mettre à l’aise.

Mais sa figure ne m’allait pas ; elle me paraissait sombre, dangereuse, mystérieuse, et bientôt, comme nous cheminions côte à côte, je vis la poignée garnie d’acier d’un pistolet sortir de dessous la patte de sa poche de côté.

Porter un tel objet, c’était s’exposer à une amende