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Dès que pointa l’aube, je me réveillai, et me trouvai dans une vaste pièce tendue de cuir frappé, garnie de meubles ornés de belles dentelles, et éclairée par trois grandes fenêtres.

Dix ans, peut-être même vingt auparavant, cette chambre avait dû être fort agréable au coucher ou au réveil, mais l’humidité, la saleté, l’abandon, les rats et les araignées y avaient fait de leur mieux depuis.

En outre, un grand nombre de vitres étaient brisées.

À vrai dire, ce détail se retrouvait un peu partout dans la maison, si bien que, je crois, mon oncle avait dû être assiégé à je ne sais quelle époque par les gens du pays ameutés, et conduits peut-être par Jennet Clouston.

Cependant, comme le soleil brillait au dehors et qu’il régnait un très grand froid dans cette misérable chambre, je frappai et j’appelai à grands cris, jusqu’à ce que mon geôlier vînt et me mît en liberté.

Il m’amena à l’arrière de la maison, où se trouvait un puits, et me dit de m’y laver la figure, si j’en éprouvais le besoin.

Cela fait, je tâchai de retrouver mon chemin vers la cuisine, où il avait allumé le feu et faisait la soupe.

Le couvert était mis : deux écuelles et deux cuillers de corne, mais une seule cruche de petite bière.

Sans doute mon œil s’arrêta avec quelque surprise sur ce dernier détail, et mon oncle s’en aperçut car, parlant comme s’il répondait à ma pensée, il me demanda si j’aimais l’ale, c’est ainsi qu’il appelait sa bière.

Je lui dis que j’en buvais habituellement mais qu’il ne devait pas se mettre en peine pour cela.

— Non, non, répondit-il, je ne vous refuserai rien de raisonnable.