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CHAPITRE LII

DE LA COUR


En 1785, il y avait société, c’est-à-dire que des êtres indifférents les uns aux autres, réunis dans un salon, parvenaient à se procurer si ce n’est des jouissances fort vives, au moins des plaisirs fort délicats et sans cesse renaissants. Le plaisir de la société devint même si nécessaire qu’il parvint à étouffer les grandes jouissances qui tiennent à la nature intime de l’homme et à l’existence des grandes passions et des hautes vertus. Tout ce qui est fort et sublime ne se trouva plus dans les cœurs français. L’amour seul fit quelques rares exceptions[1] ; mais, comme on ne rencontre les grandes émotions qu’à des intervalles fort éloignés, et que les plaisirs de salon sont de tous les instants, la société française avait un attrait que lui ont procuré le despotisme de la langue et des manières.

Sans que l’on s’en doutât, cette extrême

  1. Il n’est pas question des neuf dixièmes de la société qui ne sont ni polis, ni influents.