Page:Stendhal - Souvenirs d’égotisme, 1927, éd. Martineau.djvu/101

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

on ne saurait le nier, mais un esprit comme les cornes du chamois : sec, dur et tortu. M. Fauriel, qui alors goûtait beaucoup mon mérite, me mena bien vite chez Mademoiselle Clarke, j’y retrouvai mon ami Augustin Thierry, auteur de l’histoire de la conquête de Guillaume, qui, là, faisait la pluie et le beau temps. Je fus frappé de la superbe figure de Mme Belloc (femme du peintre) qui ressemblait étonnamment à Lord Byron, qu’alors j’aimais beaucoup. Un homme fin, qui me prenait pour un Machiavel, parce que j’arrivais d’Italie, me dit : « Ne voyez-vous pas que vous perdrez votre temps avec Mme Belloc ? Elle fait l’amour avec Mlle Montgolfier (petit monstre horrible avec de beaux yeux). « 

Je fus étourdi, et de mon machiavélisme, et de mon prétendu amour pour Mme Belloc, et encore plus de l’amour de cette dame. Peut-être en est-il quelque chose.

Au bout d’un an ou deux, Mlle Clarke me fit une querelle d’Allemand à la suite de laquelle je cessai de la voir, et Monsieur Fauriel, dont bien me fâche, prit son parti. MM. Fauriel et Victor Jacquemont s’élèvent à une immense hauteur, au-dessus de toutes mes connaissances de ces premiers mois de mon retour à Paris. Mme la comtesse de Tracy était au moins à la même hauteur.