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fred et avait de nouvelles occasions d’admirer son caractère. Oserons-nousle dire ?… Pourquoi pas, puisque nous peignons un cœur allemand ? Il y eut des moments de bonheur et d’exaltation où elle alla jusqu’à se figurer que c’était un être surnaturel. Le zèle sincère et plein d’enthousiasme avec lequel Mina s’acquittait de ses nouvelles fonctions eut son effet naturel sur madame, de Larçay, qui était une âme commune : elle traita Mina avec hauteur, et comme une pauvre fille qui était trop heureuse qu’on lui donnât de l’emploi. « Tout ce qui est sincère et vif sera donc à jamais déplacé parmi ces gens-ci ? » se dit Mina. Elle laissa deviner le projet de rentrer en grâce auprès de madame Cramer. Presque tous les jours elle demandait la permission d’aller la voir.

Mina avait craint que ses manières ne donnassent des idées singulières à madame de Larçay ; elle reconnut avec plaisir que sa nouvelle maîtresse ne voyait en elle qu’une fille moins habile à la couture que la femme de chambre qu’elle avait laissée à Paris. M. Dubois, le valet de chambre d’Alfred, fut plus embarrassant. C’était un Parisien de quarante ans et d’une mise soignée, qui crut de son devoir de faire la cour à sa nouvelle camarade. Aniken le fit parler et s’aperçut qu’heureusement