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RACINE ET SHAKSPEARE

rieurs par l’esprit aux Anglais de cette époque, notre tragédie nouvelle aura plus de simplicité. À chaque instant Shakspeare fait de la rhétorique : c’est qu’il avait besoin de faire comprendre telle situation de son drame, à un public grossier et qui avait plus de courage que de finesse.

Notre tragédie nouvelle ressemblera beaucoup à Pinto, le chef-d’œuvre de M. Lemercier.

L’esprit français repoussera surtout le galimatias allemand, que beaucoup de gens appellent romantique aujourd’hui.

Schiller a copié Shakspeare et sa rhétorique ; il n’a pas eu l’esprit de donner à ses compatriotes la tragédie réclamée par leurs mœurs.

J’oubliais l’unité de lieu ; elle sera emportée dans la déroute du vers alexandrin.

La jolie comédie du Conteur de M. Picard, qui n’aurait besoin que d’être écrite par Beaumarchais ou par Shéridan pour être délicieuse, a donné au public la bonne habitude de s’apercevoir qu’il est des sujets charmants pour lesquels les changements de décorations sont absolument nécessaires.

Nous sommes presque aussi avancés pour la tragédie : comment se fait-il qu’Émilie de Cinna vienne conspirer précisément dans le grand cabinet de l’Empe-