Page:Stendhal - Racine et Shakespeare.djvu/228

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
191
QU’EST-CE QUE LE ROMANTICISME ?

ce qui lui donnait tant de peine à apprendre. Il fut timide avec les anciens, et par là ne les comprit jamais. Au lieu d’imiter Racine, il eût imité Eschyle. Imitons les Français si nos pédants et Alfieri le veulent absolument, mais imitons-les comme le Dante a imité Virgile.

HISTOIRE DE LA POÉSIE[1]

Dans la discussion sur les unités, parlant à un public éclairé, j’ai resserré en vingt pages ce qu’un pédant eût allongé en deux cents. Je respecte trop le temps de mes lecteurs pour tomber dans un pareil défaut. Je vais donc encore supprimer toutes les idées intermédiaires ; je vais jeter un coup d’œil rapide sur l’histoire de la poésie.

Pour des âmes efféminées, pour des âmes rouillées par l’étude du grec et rapetissées par la vie monotone du cabinet, et qui ne peuvent souffrir un vers énergique si elles n’y reconnaissent à l’instant une imitation d’Homère ; pour de telles âmes, dis-je, la mâle poésie de Shakspeare, qui montre sans détours les malheurs de la vie, est physiquement insupportable.

Shakspeare, c’est-à-dire le héros de la

  1. Chapitre, fait observer M. Martino, en partie adapté et traduit de l’Edinburgh-Review. Une partie de ces pages, et seulement à l’état de brouillon, se trouve dans les manuscrits de Grenoble. N. D. L. É.