Page:Stendhal - Racine et Shakespeare.djvu/167

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
130
RACINE ET SHAKSPEARE

Stuarts, qui pourrait trouver odieux le personnage du baron de Bradwardine ou le major Bridgenorth de Peveril ? Notre politique de 1811 n’est plus que de l’histoire en 1824.

Si, suivant les conseils du plus simple bon sens, vous écrivez aujourd’hui sans vous embarrasser de la censure actuelle, peut-être qu’en 1834, par un juste respect pour vous-même, et afin de repousser le désagrément de toute ressemblance avec les hommes de lettres de la trésorerie d’alors, vous serez obligé d’affaiblir les traits dont vous aurez peint les noirs ridicules des puissants d’aujourd’hui[1].

Êtes-vous impatient ? voulez-vous absolument que vos contemporains parlent de vous tandis que vous êtes jeune ? avez-vous besoin de renommée ? écrivez vos comédies comme si vous étiez exilé à New-York, et, qui plus est, faites-les imprimer à New-York sous un nom supposé. Si elles sont satiriques, méchantes, attristantes, elles ne traverseront pas l’Océan, et tomberont dans le profond oubli qu’elles méritent. Ce ne sont pas les occasions de nous indigner et de haïr d’une haine impuissante qui nous manquent

  1. « C’est monsieur un tel qui a eu l’heureuse idée du poing coupé ; », ou bien : « Monseigneur, quand vous ne parlez pas, ma foi, je vote suivant ma conscience. »