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présenta deux fois chez lui pour le voir, il ne fut pas admis. Ainsi que Hobbes il avait peur dès qu’il se trouvait seul.

L’autre homme illustre qui fut en Italie le précurseur de Napoléon fut le comte Pietro Verri. En 1765 Kaunitz, le Colbert de l’Autriche, le fit conseiller au suprême conseil de l’Économie publique. En 1772 il en fut vice-président et président en 1780. En 1783 il fut conseiller intime et eut le cordon de Saint-Étienne. L’extrême franchise de son caractère, l’ardeur avec laquelle il démasquait l’hypocrisie le firent disgracier en 1786. Dix ans après il fut un des premiers hommes employés par Bonaparte. Mais s’il eut le bonheur de voir la résurrection de son pays, il ne put en jouir. Il cessa de vivre un an après l’entrée des Français, le 28 juin 1797, à soixante-neuf ans.

En 1777 Marie-Thérèse avait institué à Milan une société d’agriculture ; Verri en fut le président. Sa grande action est d’avoir délivré sa patrie du joug des fermiers généraux pour les impôts. Il faut réfléchir un instant et l’on concevra quel patriotisme, quel courage et quelle probité il fallut à Verri pour faire supprimer des gens qui chaque année gagnaient un demi-million chacun, et qui en rendaient quelque chose à tous les ministres. Dans une