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MOLIÈRE

vraie pour M. de Roicy, mais arrangée à notre manière, elle lui serait plus agréable (pourvu toutefois qu’il n’y eût pas trop de passion).

Des scènes de cette nature feraient une peinture nationale, peu agréable peut-être mais qui peindrait parfaitement nos mœurs au philosophe qui, dans mille ans, voudrait les connaître.

No 2, page 21.

Le coloris de cette scène ne prouve point encore la résolution forte qui y est énoncée. On est fâché de voir Cléante se proposer d’aller chercher en d’autre lieux la fortune que le ciel voudra lui offrir. Ce manque de raison affaiblit tout ce qu’il dit contre son père.

Il fallait dès l’abord précipiter le spectateur au milieu d’un événement qui lui fît conclure tout ce que Cléante avance, lui fît voir son genre de vie, et une partie des rapports d’Harpagon avec le monde.

Je ne sais pourquoi Molière, dont le caractère mélancolique sentit si bien l’amour et la jalousie, s’est refusé la peinture d’amants passionnés, le meilleur passeport pour faire tout passer, même la plus sublime philosophie.