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CINQ-MARS

n’est qu’à sept lieues de Tours. Comme on sait, le fameux château de ce nom est construit sur un pont qui traverse le Cher, et c’est dans les premières piles, qui sont creuses, que l’on a pratiqué les cuisines. Ce château est habité et parfaitement conservé ; on fait remonter son origine au treizième siècle : ce fut sans doute une sorte de tête de pont qui favorisait les excursions du seigneur sur les deux rives du Cher.

En suivant de l’œil les rivages de la Loire, je lisais avec plaisir l’Histoire de l’art gothique, par M. de Caumont. Ce petit volume de trois cents pages me semble extrait des ouvrages anglais, il a des lithographies amusantes, mais pas toujours fort exactes. On voit que M. de Caumont n’a pas voyagé, et les auteurs anglais qu’il suit ne connaissent pas le midi de la France. C’est en Angleterre, et il n’y a pas cinquante ans, que l’on s’est avisé d’étudier l’art gothique. Cette étude va bien à la folie aristocratique qui domine ce pays[1].

À quatre lieues et demie de Tours, on a la bonté de m’indiquer la pile Cinq-Mars ; c’est un pilier quadrangulaire de quatre-vingt-six pieds de haut, et chacune des quatre faces a douze pieds et demi de largeur. Cette pile est un massif plein qui n’a

  1. Qu’est-ce que coûte l’œil d’un médecin ? disait dernièrement le comte ***.