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MÉMOIRES D’UN TOURISTE

fort bien à cheval, dansant, faisant des armes, grand chasseur, grand hâbleur, et au total le plus grossier des hommes. Je m’étonnais qu’une personne douée d’une âme si noble, d’une délicatesse si réelle et si rare, pût supporter cet être qui, aux yeux de nous autres hommes, eût fait tache, même à une table d’hôte passablement composée. Quand je vis la jolie veuve pour la dernière fois, sa préoccupation n’était que trop naturelle. Par surprise, et même, on peut le dire, en employant la force, le Mass… venait de conquérir ce qu’autrement il n’eût jamais obtenu. Ce n’est pas tout : avec une effronterie choquante et bien digne de lui, le Mass… a fait confidence des détails les plus intimes de cette étrange aventure à un de ses compagnons de chasse, assez bon diable, qui m’a tout raconté. Il lui disait : « Actuellement que je suis aimé d’une femme immensément riche, et sur l’âge, mon affaire est des bonnes. » Ce monstre-là appelait sur l’âge une femme qui n’a pas trente ans, et qui d’ailleurs est charmante.

Une fois que le guet-apens de Mass… eut réussi, il paraît que cette pauvre femme essaya de l’aimer ; mais elle ne put y parvenir. Elle éloignait le plus possible les rendez-vous. Qu’est-ce que ça me fait à moi, disait Mass… (je demande pardon du jar-