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MÉMOIRES D’UN TOURISTE

la base des piliers gothiques du chœur. Le bedeau m’a montré le tombeau en marbre blanc des enfants de Charles VIII. J’ai appris là qu’on appelle tour de Charlemagne cette tour carrée que l’on donne ici pour un reste de l’ancienne église de Saint-Martin. J’ai vu la bibliothèque, le musée chétif. En sortant de la cathédrale, j’ai trouvé une assez jolie rue ; mais les maisons sont trop basses pour avoir du style, pour dire autre chose au passant, sinon : Vous êtes au village. Cette rue m’a conduit dans la partie de la ville située au couchant de la belle rue ; cet ancien Tours est fort mal bâti.

Je m’étais arrêté une heure chez un bouquiniste à côté de la cathédrale ; je laisserai ses bouquins dans les auberges à mesure que je les aurai lus. Lire au lieu de regarder, c’est sans doute mal faire le métier de voyageur ; mais que devenir pourtant dans les moments où les petitesses de la province font mal au cœur ?

Comme je voyais que Tours commençait à me déplaire excessivement, j’ai pris une petite voiture et suis allé errer dans la campagne ; le cocher a pris la route de Luynes. J’ai aperçu de tous les côtés beaucoup de fertilité, beaucoup de bonne et sage culture ; mais en vérité rien de beau. Quelle différence avec les bords inconnus de l’Isère !